Les mondes d'Eldeore

Archibald Tamna était venu à la Triarchie de Reilux pour enquêter principalement sur les Azriens et leurs motivations quant à la tentative de destruction totale des galaxies environnantes. Mais désormais, il se trouvait dans un cachot psy-hermétique, condamné à mourir de faim et de soif, alors que des événements d'une importance capitale se déroulaient autour de lui. Il ne peut rien faire. Il marche de long en large dans sa cellule, s'estimant heureux d'avoir au moins une cellule dans laquelle il peut marcher, et pas un bête placard à balais servant généralement de cachot. Archi avait droit à une cellule de luxe, ce qui n'étais pas si mal. Le seul problème était que les personnes ayant programmé son arrestation étaient bien plus puissante que le plus puissant des Azriens. La cellule dans laquelle il se trouvait était donc psy-hermétique, ce qui signifie qu'aucune force non-physique ne peut agir à l'intérieur. Et pour ceux qui n'ont pas encore compris; ça veut dire qu'Aldebaran ne peut pas aider Archibald à sortir de là. De plus, disons-le bien que cela paraisse logique, toutes ses armes lui ont été retirées. Il ne peut absolument rien faire. Il se lève et regarde par la double vitre en plexiglas... car oui, ce peuple aux machineries et à la technologie à vapeur très avancée possède du plexiglas; c'est le seul moyen de clore entièrement une barrière psy-hermétique. Il lui suffirait donc de briser la vitre en plexiglas, mais cette chose est solide. C'est la prison parfaite. Il pose ses mains de chaque côté de la porte, et laisse tomber sa tête en avant jusqu'à frapper la vitre. Ça fait mal, forcément, mais il ne compte pas frapper plus que ça. Il reste là, la tête posée contre la vitre. Archi va sûrement mourir, seul, et Eldeore ne sera plus protégé. Aldebaran saura qu'il doit chercher un nouvel élu, dans tous les univers de tous les mondes, mais Archi a déjà fait tellement pour Eldeore, il ne peut pas mourir comme ça. Quelqu'un aurait dû empêcher tout ça d'arriver. Quelqu'un aurait dû se trouver sur la route d'Archibald pour le sauver... mais il n'y avait personne. Il ouvrit la bouche et laissa échapper un soupir.

"C'est donc ma fin... la fin d'Archibald Tamna. J'ai vécu de nombreuses aventures, je ne devrais rien regretter, mais pourtant j'aurais voulu continuer. Tout ça va me manquer. Ou, non, en fait je serais mort donc de toute façon je m'en fiche. Mais c'est surtout le fait de mourir qui me déprime... je devrais avoir peur, plutôt, mais j'ai sauvé tellement de mondes, je doute vraiment que qui que ce soit puisse prendre la relève correctement. Aldebaran ne pourra pas se débrouiller seul, c'est dur de sauver un monde si on est qu'une planète. J'ai sauvé tellement de personnes, et j'ai eu si peu de reconnaissance. Bon, après, j'ai peut-être un peu détruis les stands Clouguiens et la moitié du Marché Pourpre, mais j'ai sauvé le reste de la nébuleuse, j'aurais mérité un minimum de reconnaissance.

-Et vous en avez."

Archibald ouvrit grand les yeux et la bouche. Il connaissait cette voix, elle lui était familière, et c'était loin d'être un ennemi. Jamais il n'aurai crû le revoir, et encore moins ici. Combien y avait-il de chances pour que l'endroit où il se trouve soit dans le même monde, et dans la même dimension que cet homme ? Pas beaucoup. Et pourtant, ils étaient là. Archi leva la tête et regarda au travers de la double vitre de plexiglas, pour revoir cet homme qu'il avait sauvé après maintes aventures.

"Ça fait loin depuis la chute de Plateau, Rogue."

Rogue Delevolus se tenait là, de l'autre côté de la porte qui séparait Archi du reste du monde. Une main aidante tendue vers lui, une personne qui avait croisé son chemin et qui avait été envoyée pour le sauver. Depuis le début, et il le comprenait désormais, Rogue "Black" Delevolus n'était là que pour le sauver.

"Archibald Tamna. On ne s'est pas vus depuis quelques semaines, en effet, mais je n'irai pas dire que "ça fait loin". Je dirai plutôt que je vous doit une fière chandelle et que si je n'avais pas voulu piller le culte de Tar, je ne vous aurais pas retrouvé.

-Piller le culte de Tar ? Mais vous êtes un pirate plus fourbe que moi ma parole.

-Certainement. Mais ils avaient ce... champ de force, autour de leur chapelle, je me suis presque brisé le nez.

-Oh... vous aussi.

-Assez de bavardages, Archibald, je suis venu vous sortir de là. Je vais vous donner ma montre ultrasonique. Une fois que vous serez sorti, ma dette sera remboursée et je m'en irai aussi loin d'ici que je le peux."

Rogue tendit le bras devant lui et appuya sur un des boutons de sa montre. Le plexiglas commença doucement à se fissurer de part en part, puis éclata brutalement au visage d'Archi. Un bruit strident retentit brièvement, indiquant que la barrière psy-hermétique était rompue. Il eu très vite fait d'ouvrir la porte par la suite. Rogue tendit à Archi la montre ultrasonique, et après une poignée de main un peu trop forte à son goût, Archi s'éloigna de la cellule. Delevolus, ainsi qu'il l'avait dit, était déjà loin. Ils se reverront peut-être un jour, mais ce n'est pas le moment de penser à ça. Il chercha, trouva et récupéra avant de le mettre sur son poignet le bracelet en antimatière métamorphique qui lui servait de catalyseur pour son don et fusionna les deux systèmes ensemble pour en combiner les effets. Son catalyseur prit la forme de la montre ultrasonique, offrant en plus de ça une esthétique préférable, et désormais il possédait un "gadget" qu'il n'avait pas pu se procurer avant mais qui lui serait pourtant bien utile pour toutes sortes de choses. Exploser du plexiglas par exemple... mais ça fait bien d'autres choses aussi. Casser le plexiglas c'est juste pour faire échapper les gens de leurs prisons pas-si-parfaites-que-ça. Le système ultrasonique fonctionne de manière parfaite, et pourtant simple; une variation d'onde sonore, à l'intensité choisie, est envoyée vers l'objet visé et en se débrouillant bien on atteint l'objectif choisi. Certaines personnes ne comprennent pas le fonctionnement de ces engins, mais d'autres, comme Archi, trouvent le moyen de faire ce qu'ils veulent directement. C'est pour ça qu'il réussit du premier coup à déverrouiller la porte principale des cachots.

Avant de l'envoyer aux cachots, le Maire avait dit à Archi qu'il savait qui il était et ce qui l'envoyait; en l’occurrence, Eldeore. Mais il n'avait pas dit comment il savait tout ça. Une puissance supérieure commandait la Triarchie de Reilux, la question ne se posait pas, et Archibald devait absolument trouver qui les commandait, et l'arrêter. En y repensant, le Maire avait mentionné aussi leur système... A.E.R.I.S., qui leur servait apparemment d'arme, ou du moins de système de destruction massive. Il ne savait pas exactement ce que projetaient les Azriens, et il commençait à se demander si il devait sauver cet univers ou trouver qui donne ces informations au Azriens. Sauver un univers, c'est un peu son boulot, mais d'un autre côté la personne ou la chose qui les aide est sûrement plus dangereuse à elle seule que la Triarchie entière. Archi arrivait à la sortie de la prison, se trouvant à la surface de la Forge. Tout le sous-sol de cette planète est constitué de tunnels énormes, et une dizaine d'entre eux ne servent que de prison pour le peu de prisonniers que font ces gens-là, Archibald en faisant partie. Peu importe qui aide les Azriens, cette personne ne veut pas le voir mort. Archi devait trouver un moyen rapide d'atteindre Azlar pour revoir le Maire. La dernière fois, il était attendu, et bien qu'il ait été envoyé en prison entre temps, il est tout à fait possible qu'il soit de nouveau prévu qu'il pénètre la Mairie. Vu qu'il se trouvait dans la Forge, il devait éviter de croiser le Contremaître; l'équivalent du Maire, mais celui-ci ne dirige que la Forge et pas le reste. Tout comme le Hangar était dirigé par l'Organisateur. Mais le plus dangereux des trois dirigeants de la Triarchie est le Contremaître qui, paraît-il, a l'habitude de plier en deux des poutres de fer à l'aide seule de ses mains. Il mesurerait plus de deux mètres de haut et pèserait 200kg de muscles purs. Une bête à éviter de rencontrer donc. La Forge était remplie de projets non-terminés, mais par chance, Archibald se trouvait proche du garage qui servait à réparer les avions endommagés. Avec un peu de bol, il trouverait rapidement un avion en état de voler, au moins suffisamment pour atteindre Azlar. Ce n'est pas si loin, à peu près douze kilomètres. Plutôt que de réfléchir, Archi se rends donc le plus vite possible près des garages. Plusieurs personnes sont occupées à réparer les quelques avions qui s'y trouvent. Ça risque de compliquer un peu les choses. Heureusement, Archibald possède désormais une nouvelle arme qui lui sera très utile, bien qu'en fait, ce ne soit pas réellement une arme et qu'il ne pourra faire de mal à personne avec ça. Il tends son bras et utilise sa montre ultrasonique pour démonter un réacteur et le faire tomber, assommant au passage un des ouvriers. Mais ça, ce n'était pas prévu, ça risquerait de faire venir le Contremaître et c'est loin d'être une bonne chose.

Apparemment, cet avion était en très mauvais état, et la réparation devait être faite à tout prix. Archibald décida donc, après que les ouvriers de l'avion d'à côté partirent pour aider l'inconscient, qu'il allait voler un autre avion. De plus il venait de détacher le réacteur de celui-ci. Il monta donc dans l'avion d'à côté en faisant bien attention de ne pas se faire remarquer, mais alors qu'il cherchait comment l'activer, il aperçut à cinquante mètres de là, une ombre qui se déplaçait dans sa direction. Les ouvriers avaient été incapables de réparer cet avion et l'un d'eux avait détruit un réacteur (oui, c'est que tout le monde a cru, au final). Du coup, il arrivait. Le seul à pouvoir finir le travail rapidement et efficacement, c'était forcément le Contremaître. Archi paniqua un bref instant avant de reprendre ses esprits. Il se rapprochait. Archi utilisa encore une fois sa montre ultrasonique, pour fermer la porte du garage cette fois. Ce n'était pas sûr que ça ralentisse le Contremaître, mais c'est toujours ça de fait. Archi commença à taper au hasard tous les boutons du tableau de commande jusqu'à ce que, finalement, il parvienne à allumer le moteur. Un large nuage de vapeur sortait de l'arrière de l'avion. Il n'avait pas remarqué ça sur les avions qu'il avait descendu. La réparation devait se faire à se niveau là sûrement. Une alarme retentit bruyamment. Forcément, il était interdit d'allumer les machines dans les garages. Le Contremaître entra en défonçant littéralement la porte du garage. Au moins Archi allait pouvoir sortir sans avoir d'accident, mais le Contremaître... n'avançait plus ? Il était resté à l'entrée, comme en attendant quelque-chose. Et cette chose arriva; un énorme interrupteur sortit du mur à côté de lui, en projetant quelques jets de vapeur. Il arracha entièrement la vitre protectrice et frappa son énorme poing sur l'interrupteur. L'alarme cessa. Il voulait peut-être ne pas ébruiter l'affaire ?

Archi cessa de se poser des questions et appuya sur l'accélérateur de son avion. Le Contremaître s'en alla, le laissant passer. Il avait prévu quelque-chose, c'était sûr. Et, alors qu'il décollait, Archibald aperçut une partie de la Forge s'ouvrir. Le sol se séparait en deux, et avant que la trappe soit totalement ouverte, un jet de vapeur semblable à un geyser en sortit, rapidement suivi d'une forme sombre cachée par la fumée. Cette chose était grosse, très grosse, et c'est certainement pour ça que le Contremaître a laissé Archi partir. Il mit le cap directement sur Azlar, il lui fallait moins de cinq minutes pour s'y rendre, mais c'était sans compter sur une attaque aérienne. Il était presque ébloui par la lumière des deux soleils, l'un au-dessus de lui et l'autre à sa gauche, alors qu'Azlar se trouvait droit devant lui. Il n'osait pas regarder derrière lui, de peur de voir une créature le poursuivre, mais il n'en fut rien. Cette chose était devant lui. Il évita de justesse cet espèce de Léviathan mécanique, encore une machine à vapeur, mais celui-ci était bien plus complexe. Il pouvait se mouvoir librement dans l'espace sans réacteur, et bien que ses systèmes soit compactes, on pouvait entre-apercevoir une lueur bleutée, électrique, en son cœur. Archi eut une révélation. C'était donc ça, le projet A.E.R.I.S de la Triarchie de Reilux. Et c'était prévu depuis le début; c'était prévu qu'il s'échappe, les Azriens avaient besoin de tester leur arme sur lui. Mais ils n'en tireront rien. Archibald savait désormais ce qu'il devait faire. Si des armes pareilles étaient construites à Reilux... il devra détruire Reilux. En essayant au maximum d'éviter les assauts du Léviathan, il programme sa montre ultrasonique pour booster son réacteur, et fonce en direction de la planète-ville des Azriens. Alors qu'il ne reste plus qu'une centaine de mètres entre lui et la planète, il regarde une dernière fois derrière lui. La créature le suis, c'est ce qu'il voulait. Il se retourne en exécutant un looping rapide, et lance son avion sur le Léviathan qui, évidemment, ne mourra pas, mais sera perturbé par le choc. Comme prévu, il donne un violent coup de ses dents métalliques et cache sa propre vision avec l'avion, manquant de peu de couper Archi en deux. Et sans le savoir, le Léviathan va percuter Azlar. L'arme qui était censée garantir son règne va causer la perte de la population Azrienne, et Archibald sera emporté avec l'explosion de la planète. Premier choc. L'avion percute la surface d'Azlar, commence à se désagréger en s'écrasant violemment contre la planète. Second choc. Le Léviathan percute à son tour la surface de la planète. Sa structure externe reste intacte; et mieux, il commence à pénétrer dans le sol de la planète, avec assez de vitesse pour se rapprocher du noyau Archibald est toujours en vie, il sens la pression de la planète l'écraser, mais il ne souffre pas. Tout se passe trop vite, il ne ressens rien. Il savait que ce jour arriverai. Il ferme les yeux, il est en paix. Le Léviathan explose, en même temps que l'avion, et cause par la suite une réaction en chaîne qui détruits le noyau d'Azlar et cause l'implosion de la planète. Un trou noir se forme, et tout la galaxie d'Omscion est aspirée dedans en moins d'une minute. C'est fini, tout est fini.

Loin d'ici, Aldebaran est seul. Il voit le trou noir, il sait qu'Archibald ne reviendra pas. La seule chose qu'il lui reste à faire est de retourner dans son monde d'origine. Il aurait voulu sauver Archi, mais tout aurait échoué. Ni lui, ni Archibald ne saura ce qui se passait sur la Triarchie de Reilux. Pourtant, il restait énormément de choses qu'Archibald devait faire. Mais bien qu'il ait toujours eu l'air d'un jeune homme d'une vingtaine d'année, Archi a sauvé des mondes durant soixante-dix longues années, et ne connaissait Aldebaran que depuis quelques mois. Plus personne ne protège Eldeore. C'est fini.

Mais Archibald se réveille. Il ouvre les yeux. Tout, autour de lui, est vide, blanc, aucune matière, aucune antimatière, aucun sol sous ses pieds, aucun ciel au-dessus de lui. Seulement cette voix, lointaine. Il décide de la suivre. Il se rapproche de plus en plus, et commence à comprendre certains mots.

"...bientôt...sera...retour..."

Il ne comprends toujours pas le sens de tout ça. Il est sûr d'être mort, mais il se sens en vie. Il tente encore de se rapprocher de cette voix, mais il ne l'entends plus. Il ne sait pas où il est, il ne sait pas où aller. Il s'assoit et attends. Il espère au fond de lui que cette voix lui annonçait son futur retour dans le monde des vivants. Mais il ne sait rien, il est seul, et rien n'aurait pu le préparer à ce qui allait arriver.